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Poème
Poèmes

Christian WEBEL

ex chansonnier des théâtres :
«Les Trois Baudets» à Alger, «Les Deux Anes» à Paris !

Quand ma pensée s'en va vers l'Afrique du Nord ,
Je me sens, tout à coup, bourrelé de remords ,
Que l'Algérie fut une province française,
C'est évident bien sûr . . . bien qu'à tous ça ne plaise !
Que des hommes aient fait d'un bled, qui n'était rien
Ce beau pays algérien ,
Nul ne peut dire le contraire ,
Et savez-vous de qui furent les grands-pères ?
Vous seriez étonnés d'en apprendre les noms
Oui, Vaillard est sétois, René-Paul est breton,
Mais moi, pur parisien, je suis de Kabylie ,
Je suis natif d' El - Kseur, à deux pas de Bougie,
Et notre Roméo, oui Roméo Carlès,
Il est natif d' Oran, ou de Sidi bel Abbès.
Tenez, Colette Mars, encore une Algéroise.
Et le Maréchal Juin de l'Académie Française,
Est aussi de là-bas, comme Pierre Blanchard ,
Et le clown Zavata, et l'auteur Paul Achard ,
Des acteurs honorant la Comédie Française :
Aimé Clariond, Bertheau sont de souche oranaise ,
L'écrivain Paul Vialard, Yves Vincent aussi ,
Mari-José, Françoise Arnoul et Rossoti ,
Vous ne vous doutiez pas d'une telle série
D'artistes parisiens produits par l' Algérie
Oui,. . . vous la connaissez si mal en général !
Mais Alger ! c'est Bordeaux, ou Marseille, ou Laval,
Oran, mais c'est Strasboug, à moins que ce ne soit Lille,
Et Tours ou Chateaudun . . . disons Philippeville !
Seulement , ces temps-ci, il faut compter là-bas ,
Avec un mécontent . . . un certain fellagha .
Et, petit fellagha, c'est à toi que je pense,
En voyant ta rancune, à l'égard de la France ,
J'ai beaucoup réfléchi, et ma méditation,
M'a décidé à venir te demander pardon
Oui, pardon fellagha, pardon pour mon grand-père
Qui vint, tracer la route et labourer la terre ?
Il est tombé chez toi, il a tout chamboulé :
Où poussaient des cailloux, il a foutu du blé
Et mettant après ça , le comble de l'ignoble,
Où poussaient des cactus, il a fait un vignoble !
Pardon, cher petit fellagha ,
O pardon pour tous ces dégâts !
Et mon affreux grand-père, il faut qu'on le confesse,
N'était pas le seul de son espèce !
D'autres scélérats, ont bâti des cités,
Par surcroît de férocité,
Ils y ont installé, l'eau l'électricité ,
Et tu n'en voulais pas, c'est la claire évidence ,
Puisque , avant qu'arrive la France
Tu n'avais, en dehors de la casbah d' Alger,
Que , la tente, ou bien le gourbi, pour te loger,
Et, tu t'éclairais à l'huile.
Nos maisons, bien sûr, pour toi, c'était une tuile,
Et l'électricité, là encore soyons francs ?
Tu ne demandais pas qu'on te mette au courant
Tu t'es habitué, à ces choses infâmes ,
Mais à regrets, la mort dans l'âme . . .
Stoïquement, d'ailleurs supportant ces malheurs ,
Avec courage et bonne humeur .
Même tu t'engraissais, mais de mauvaises graisses,
Car, tu prenais le car (une invention traîtresse ),
Ce même car que, pris d'un délire divin,
Tu devais, un beau jour, pousser dans les ravins
Je comprends ta rancœur, je comprends ta colère ,
Tu n'es pas au niveau des arabes du Caire,
Tu gagnes, et tu vis mieux qu'un fellah égyptien ,
A quoi Nasser ? Nasser à rien .
Nous avons massacré, tes lions, tes panthères,
Nous avons asséché, tes marais millénaires,
Les moustiques sont morts !, les poux . . . de profundis. .
Nous avons tout tué . . . même la syphilis ,
Ah, pardon fellagha, pour de pareils carnages,
Nous avons fait tout ça, . . .c'est bougrement dommage,
Car, si d'autres idiots, l'avaient fait, inspirés,
C'est nous qui, maintenant, viendrions " libérer "
Et bouffer, les marrons cuits, par ces imbéciles
C'aurait, été moins long . . .et beaucoup plus facile !
Bien pardon, fellagha, de t'avoir mieux nourri ,
De t'avoir vacciné, pour le béribéri ,
Et d'avoir, à tes pieds nus, mis , ô maladresse,
Ces souliers . . .
Dont tu voudrais nous botter les fesses !

 


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